Les TICE : On n’invente pas la pédagogie, on la réinvente !

Pour accompagner notre dossier spécial « Enseignement à l’ère du numérique », Lettres numériques vous propose également une interview du directeur de l’Athénée Royal d’Ans, Manuel Dony qui a accepté de nous expliquer son projet numérique. Nous l’en remercions.

Récemment sélectionnée dans l’appel à projets « École numérique » lancé par la Fédération Wallonie-Bruxelles, votre école se démarque des autres établissements. Pourriez-vous nous parler de cet intérêt pour les nouvelles technologies et nous expliquer comment cela a débuté ?
Nous avions tout d’abord installé un centre Mac dans les écoles. C’est ce qu’on appelait en son temps le projet cyberclasses. Nous avions équipé techniquement des locaux de matériels issus de la technologie Mac. Nous avions également pris part à un projet européen appelé MOVE ON qui regroupe de nombreuses écoles européennes. Le but était de créer une plateforme entre les différents projets et pays. Ces différents projets migraient d’une logique de cyberclasse vers une logique nomade. Nous nous sommes questionnés et nous avons réfléchi à ce qui constituait la prochaine étape. Nous souhaitions une technologie accessible partout mais pas tout le temps, possible, mais certainement pas obligatoire. Nous avons donc élaboré un projet que nous avons soumis à l’appel à projet « École Numérique » qui a finalement été retenu.

Comment s’articule ce projet ?
Le projet s’organise en deux phases : de janvier à juin 2012, nos principales préoccupations ont été de développer des connectiques dans les écoles, l’installation de bornes wifi partout et dans des mesures de sécurité optimales, la création de petits postes et des mesures de santé ; ensuite en septembre débutera la phase de lancement dans les écoles à proprement parler.

A ce jour, deux écoles sont impliquées dans ce projet : le collège du Sacré-Coeur de Charleroi et l’Athénée Royal d’Ans. Nos centres scolaires disposent déjà de 24 iPads ainsi que de mallettes permettant la synchronisation simultanée des appareils. Les professeurs impliqués dans le projet ont déjà suivi 60 à 80 heures de formation sur leur temps libre. Ils démontrent une réelle volonté de s’investir. Je pense que les autres membres du corps professoral suivront et rejoindront les premiers volontaires de l’établissement.

Quelles sont les matières impliquées dans ce projet ?
Deux matières sont ciblées par ce projet technologique : le français et les mathématiques en première année. Il faut savoir que les éditeurs partenaires du projet ne désiraient au départ pas viser cette tranche d’âge-là mais bien celle des plus grands. En fait, nous avons choisi de privilégier ces classes suite aux conclusions avancées par nos confrères européens qui ont démontré qu’il valait mieux familiariser les élèves au numérique dès le début de l’enseignement secondaire et non pas en cours de route.

Par l’adoption de pareilles technologies qui ne sont pas un outil parmi d’autres, on voudrait dépasser le simple « concept » de ressources  et davantage s’attacher à l’évolution que cela pourrait engendrer dans la relation professeur – élève. Bien plus, nous pensons que cela va fondamentalement transformer la dynamique de la classe. D’une relation verticale, on se dirigera vers un rapport plus horizontal et exploiter d’autres horizons. L’iPad, par exemple, ne va pas servir à apprendre, mais bien plus à procurer et organiser des ressources, ce qui permettra une certaine maîtrise de celles-ci par la suite. Il en va de même pour les remédiations. En effet, si une lacune dans une matière est observée chez un élève, ce dernier pourra la retravailler au moyen d’un iPad sur lequel figureront des séquences enregistrées par ses camarades. La solidarité est donc de mise. Nous avons décidé de constituer un corpus de remédiation en ce sens qui permettra aux étudiants en difficulté de compléter les explications reçues au préalable.

Pouvez-vous nous donner des exemples d’emploi de ces iPads ?
Il faut souligner que grâce aux TICE, on n’invente pas la pédagogie, on la réinvente. Ainsi, la dictée, qui a longtemps été délaissée par nos enseignants, pourrait revenir à la mode. Avec de telles technologies, les élèves ne seront plus prisonniers du rythme du professeur, des bruits extérieurs, etc. Désormais grâce aux iPads, les élèves peuvent faire l’exercice avec les écouteurs sur les oreilles et apprendre à gérer leur temps, revenir en arrière, identifier leurs difficultés, trouver des solutions … Cela les rend plus autonomes et responsables puisqu’ils pourront rechercher eux-mêmes les règles grammaticales pour corriger leurs erreurs ou en cas de doutes !

Pour le moment, les professeurs créent leurs outils de travail et se familiarisent avec ces technologies, ce qui correspond à la phase d’expérimentation. Ensuite, les iPads seront mis entre les mains des élèves dès le 15 septembre prochain. D’ici là, il reste encore un énorme travail à fournir. Il faut éditer les profils de tous les membres de la communauté éducative, régler les derniers soucis logistiques et créer des outils pédagogiques capables de subvenir aux besoins des élèves. Le projet prévoit la mise à disposition finale de 180 iPads et les équipes techniques prépareront les mallettes au cours du mois de juin.

Cette nouvelle orientation a-t-elle un impact au niveau du taux d’inscriptions dans votre établissement ?
L’année passée sans être équipé en iPad, nous avions réalisé un taux de 40 % de nouveaux inscrits au 1er niveau sans savoir pourquoi. Cette année, on a fait un taux similaire à l’année passée. Je pense qu’on atteint la capacité maximale. Mais l’on remarque clairement un intérêt des parents qui cherchent des réponses à leurs nombreuses questions et qui montrent aussi une certaine inquiétude face à ce développement technologique. En règle générale, ils sont vraiment favorables à la présence et à l’utilisation des ordinateurs dans le cadre de l’école.


— Stéphanie Michaux

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Stéphanie Michaux

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