ePagine au service des libraires
Face aux géants américains du livre numérique tels qu’Amazon et Apple, un réseau de libraires français s’est constitué sous la houlette de la marque ePagine particulièrement connue pour sa librairie en ligne. Bien plus que cela, ce département de Tite-Live offre différents services aux libraires. Christophe Grossi, libraire en ligne pour ePagine et animateur du blog du même nom, a accepté de nous en dire plus. Merci à lui.
A propos d’ePagine
ePagine est un développement logique de la plateforme Tite-Live qui édite et commercialise des logiciels de gestion de stocks et des outils d’information pour les libraires. Stéphane Michalon était encore, il y a quatre ans, Directeur Général des librairies L’Arbre à Lettres à Paris, quand, s’intéressant de très près aux développements numériques du livre, il s’est demandé comment faire pour que les libraires indépendants puissent eux aussi proposer des livres numériques à leurs clients. Il est allé poser la question à François Boujard, P.D.G. de Tite-Live, et, dans la foulée, ils ont créé ensemble ePagine. On a commencé par faire des tests avec plusieurs éditeurs en numérisant au minimum un titre de leur catalogue. ePagine, dans un premier temps et pour équiper des libraires, a dû monter un studio de création d’ePub (ce qu’il est toujours pour les éditions de Minuit notamment). Ensuite, il a fallu créer un entrepôt numérique pour stocker les fichiers afin de les diffuser et les vendre. Après, tout l’enjeu était de convaincre les responsables des librairies traditionnelles de participer à cette aventure. ePagine est donc bien plus qu’une libraire en ligne.
Aujourd’hui ePagine c’est ?
Aujourd’hui, le réseau ePagine regroupe environ 50 libraires-partenaires (je pense par exemple à Filigranes et à Tropismes à Bruxelles ou à la chaîne de librairies belges Club) tandis que Place des libraires (le portail des libraires) rassemble plus de 280 enseignes.
Nous travaillons d’abord comme une web agency, ePagine ayant pour ambition d’apporter aux libraires des solutions numériques. Nous veillons à adapter les outils en fonction des demandes de chacun, de leurs usages et de la dynamique que les libraires souhaitent insuffler à leurs sites. Quatre ans après le lancement du premier site, on remarque que le réseau des libraires-partenaires est cette fois très large. On y trouve par exemple Virgin Méga (plateforme de téléchargement de contenus numériques de la marque Virgin) mais surtout des dizaines de librairies indépendantes ainsi que des librairies 100% numériques (ou pure player).
Que proposez-vous concrètement aux libraires ?
Il y a différentes possibilités. Nous pouvons proposer aux libraires un site dédié aux livres numériques, un site avec base de données qui mixe livres papier et livres numériques, un site à l’intérieur d’un site existant (avec un onglet numérique par exemple), un site sur une borne en magasin mais également des applications sur IOS (Apple) et Androïd via ePagine reader. Nous avons également mis en place une synchronisation qui permet aux clients de récupérer en un endroit (dans une seule bibliothèque) tous les ebooks achetés sur les différents sites des libraires partenaires.
Pour les nombreux libraires traditionnels qui souhaiteraient ne pas rater le train du numérique mais auraient peu de moyens, nous leur proposons un site très simple d’utilisation, ce qu’on appelle en interne un « corner web » (c’est-à-dire un site spécialisé livres numériques) et qui est une déclinaison du site ePagine.fr. En choisissant ce site clé en main, les libraires n’ont pas à se soucier des développements, de l’ergonomie, de la gestion des flux, de la maintenance, du service après-vente. C’est également une solution rapide, peu coûteuse et très intéressante pour celui qui n’aurait aucune connaissance informatique (bien qu’il puisse néanmoins personnaliser le corner web s’il le souhaite).
Est-ce que les libraires jouent le jeu ?
Le plus difficile pour les libraires est de trouver le temps et/ou le personnel qui a développé un peu de connaissances web et serait déjà familier du livre numérique. Beaucoup ne savent pas manier un livre électronique, ne savent pas comment bloguer, comment faire des mises en avant sur le Net (ou s’y refusent). Pour ce faire, et en fonction de leurs besoins et de leurs contraintes, les libraires partenaires qui auraient choisi un corner web peuvent au choix « activer » le pilotage automatique (leur site se calquera alors sur le site ePagine.fr), gérer leur site en totale autonomie ou opter pour une solution hybride qui s’inspirerait du site ePagine.fr tout en ayant une large marge de manoeuvre.
Avec le numérique et, de manière plus générale, avec la vente en ligne, les libraires « connectés », pour faire connaître leur marque sur la toile, doivent être en mesure de communiquer via un blog ou les réseaux sociaux sans oublier la communication en magasin. Mais comment et où trouver toutes les infos aujourd’hui ? C’est pour cela que, de mon côté, je leur envoie désormais très régulièrement une newsletter professionnelle dans laquelle je les informe des dernières nouveautés, des offres promotionnelles, des opérations commerciales, des changements importants sur leur corner web… Je dois faire en amont un travail de veille, communiquer avec les éditeurs, chercher des partenariats ou répondre à des demandes. Ensuite je trie, rassemble, mets en place les bannières s’il y en a, mets en avant les titres sur la homepage, crée des tags, des sélections thématiques,…, puis rédige un billet sur le blog ePagine, le poste, le relaie… C’est à ce moment-là que j’adresse un maximum d’informations aux libraires, des infos qu’ils n’ont plus qu’à reprendre à leur compte s’ils le souhaitent. Avec ce travail de diffusion, je tente de leur faire bénéficier de ma pratique, de leur montrer qu’on peut être actif et réactif en ligne, qu’il se passe quelque chose d’important aujourd’hui du côté du livre numérique et que la médiation est un exercice assez simple.
Comment réagissent les libraires ?
Plutôt bien. J’ai cru comprendre que cette manière de communiquer leur était utile. Car, de manière générale, les libraires traditionnels que l’on accompagne ne savent pas vraiment comment suivre l’actualité et les nouveautés numériques. Pour le papier, ils reçoivent la visite des représentants mais avec le numérique, rares sont les éditeurs et les diffuseurs qui ont mis en place des outils de communication. Alors que c’est essentiel de savoir quelles sont les nouveautés mais aussi quels textes du fonds ont intégré le catalogue numérique. Ceci dit, on commence à voir sur les bons de commande des éditeurs traditionnels, à côté du titre, la référence en papier et en numérique. Cette démarche reste néanmoins marginale dans la mesure où beaucoup d’éditeurs redoutent parfois la réaction des libraires qui, en ces temps moroses, ne voient pas toujours d’un bon œil l’arrivée du numérique.
Comment concilier la marque ePagine et les prestations aux libraires ?
Le site ePagine.fr est un laboratoire qui nous permet de tester nos développements mais ePagine est aussi une marque-parapluie qui cherche à mettre en avant ses clients ainsi qu’un lieu de vente qui aide à crédibiliser « l’engagement numérique » de la librairie vis-à-vis des éditeurs.
Comme au fil du temps le site ePagine.fr a gagné en visibilité et attire chaque jour de nouveaux internautes, il a parfois pu être perçu comme un concurrent de ses clients. Mais, depuis l’arrêt du projet 1001libraires.com, ce n’est plus le cas. Nous avons depuis « accroché » ePagine.fr en tant que marque numérique de Place des libraires. Et d’ailleurs, de nombreux libraires sont déjà demandeurs pour être affiliés à cette marque qui a déjà quatre années d’existence derrière elle. Se réunir entre libraires est, on s’en doute, l’unique solution pour ne pas laisser toute la place aux géants du Net.
— Stéphanie Michaux