La question du mois : pourquoi ne peut-on pas vendre des versions couplées papier et numérique de tous les livres ?
À l’occasion du Salon de Paris en mars dernier, les éditions Eyrolles, Gallimard et Fleurus ont lancé une offre couplée numérique et papier en collaboration avec Paperus. Pour le moment expérimentale, cette offre ouvre théoriquement de belles perspectives, notamment pour les libraires physiques. En théorie, car sur le terrain, la vérité pourrait être tout autre.
L’offre couplée numérique et papier proposée, via Paperus, par Eyrolles, Gallimard et Fleurus semble assez simple. Concrètement, lorsque le lecteur passe à la caisse de sa librairie, il se voit offrir, contre une somme complémentaire (à peu près 20% supplémentaires), l’opportunité d’acquérir la version numérique du livre qu’il vient d’acheter. Comment ? Via un code QR à flasher sur son ticket de caisse. Naturellement, cette offre couplée est plus avantageuse que d’acheter d’abord le livre papier, et puis sa version numérique. « Ça fait très longtemps qu’on réfléchit à cette formule. Nous sommes convaincus que les livres papiers et numériques correspondent à des usages complémentaires, et que l’un n’est pas destiné à écraser l’autre » explique Anne de Lilliac, responsable du développement numérique aux Éditions Fleurus.
« On espère que cette offre permettra aux lecteurs classiques de faire le pas vers le numérique, tout en conservant le rôle prescripteur du libraire physique » poursuit Anne de Lilliac. Car c’est peut-être bien les libraires physiques qui pourraient tirer avantages d’une telle formule. Cette offre leur ouvre la possibilité de vendre également des contenus numériques, eux, les oubliés de la révolution digitale.
Anne de Lilliac conclut : « Pour le moment, seuls les libraires physiques ont développé cette offre. Peut-être que cela évoluera. Rien n’empêche en fait les libraires numériques qui vendent aussi du papier de mettre en place notre offre. C’est assez peu fréquent pour le mettre en évidence, il y a là une avance considérable des libraires physiques sur les libraires numériques« . Prometteur.
Bis repetita
Thibault Leonard, fondateur et CEO de Primento et ancien digital manager de la célèbre maison de disques EMI, n’est pas convaincu par l’offre couplée : « je ne pense pas que l’obstacle soit technique, mais, simplement, cette offre répond-elle vraiment à une demande ? » Il argumente : « Combien y a-t-il de livres dans votre bibliothèque que vous achèteriez en deux exemplaires ? Lorsque j’étais chez EMI, nous avions assez vite constaté, et l’industrie du disque avec nous, que les offres couplées physique/numérique ne rencontraient pas le public. L’intérêt n’est pas encore assez fort, les démarches pour télécharger les versions numériques ne sont pas assez aisées. Et puis surtout, ce n’est pas ce que les gens recherchent quand ils achètent du physique« .
Quant aux libraires, si ces offres se montrent aussi efficaces pour eux qu’elles ne l’ont été pour les disquaires, on en vient carrément à devenir sceptique. Bien sûr, les univers musicaux et littéraires ne sont pas les mêmes, mais tout de même, le rapprochement interpelle.
Thibault Leonard conclut, un peu désabusé : « l’édition et les librairies doivent se réinventer. Mais faut-il vraiment répéter les échecs précédents ? Il me semble plus judicieux de nous inspirer de ce qui fonctionne, non ?«
Douter de la réussite de la démarche d’Eyrolles, Gallimard et Fleurus est une chose ; proposer une alternative en est une autre. Thibault Leonard a peut-être une piste : « si on veut continuer à tracer un parallèle avec la musique, les recettes générées par les plates-formes de streaming comme Deezer ou Spotify ont tout de suite été intéressantes« .
En parlant de recettes, que peut-on déjà dire des premiers résultats récoltés par l’offre d’Eyrolles, Gallimard et Fleurus ? Anne de Lilliac répond : « depuis le mois de mars, les chiffres ne sont pas encore significatifs. Il faut le temps pour développer tout le catalogue. Peu de librairies sont déjà opérationnelles. Il faudra attendre que cela se généralise un peu pour avancer des chiffres parlants« .
Alors, très objectivement, il est évidemment trop tôt, comme avertit Anne de Lilliac, pour tirer une conclusion, mais l’apparente extrême prudence de Fleurus n’incite pas forcément à un enthousiasme débordant.
Et puisque trois éditeurs ont décidé de suivre le mauvais exemple de l’industrie du disque, comptez sur Lettres Numériques pour garder ça à l’œil …
Martin Boonen
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— Martin Boonen
Intéressant mais je suis en train de faire exactement le contraire : je propose aux lecteurs des versions numériques des livres Maxima d’en commander (moyennant un surcoût lié à l’expédition) la version imprimée. Lorsque le lecteur a aimé le texte, il a à coeur de le « posséder » vraiment, le souci de le conserver et de le ranger là où il pourra le retrouver facilement. Sur ces trois derniers points le livre papier et une bonne planche de bibliothèque restent imbattables. Plusieurs écueils à cette démarche : comment y associer les libraires ? Mais aussi comment bien gérer la production (Print On Demand) lorsque les ouvrages sont publiés uniquement en numérique dans un premier temps.
Anne de Lilliac conclut : « Pour le moment, seuls les libraires physiques ont développé cette offre. Peut-être que cela évoluera. Rien n’empêche en fait les libraires numériques qui vendent aussi du papier de mettre en place notre offre. C’est assez peu fréquent pour le mettre en évidence, il y a là une avance considérable des libraires physiques sur les libraires numériques« . Prometteur.
1/ Première chose à faire, c’est d’ouvrir un compte sur Adobe Digital Edition. 80% de l’offre de livres numériques en France est proposée avec une DRM Adobe, un système de protection qui va devoir vous reconnaître quand vous allez ouvrir votre fichier numérique au format ePub pour le lire et cela sur vos différents appareils. C’est Adobe qui gère cette authentification, donc passage obligatoire, tous les libraires autres qu’Apple et Amazon passent par Adobe pour la gestion de la fameuse DRM.