Quand les livres numériques atténuent la dyslexie
Trouble spécifique de l’apprentissage de la lecture ; handicap neurologique se caractérisant par des difficultés de reconnaissance des mots courants ; difficulté à identifier les lettres, les syllabes ou les mots : la dyslexie fait souffrir de nombreux enfants et adolescents. Pour ceux-là, l’apprentissage de la lecture et de l’écriture devient un véritable calvaire parfois insurmontable.
De nombreuses solutions existent cependant afin de remédier au problème. Souvent, l’accompagnement d’un(e) logopède sera vivement conseillé et entraînera une série de progrès notables. Néanmoins, depuis peu, d’autres pistes viennent renforcer et accompagner la « rééducation » des enfants dyslexiques. C’est le cas, par exemple, de la lecture sur support numérique.
Marco Zorzi et son équipe de chercheurs de l’Université de Padoue ont réfléchi au moyen de faciliter la lecture des personnes présentant des troubles dyslexiques. Il en résulte qu’une des solutions trouvées est liée à l’espacement des lettres. En effet, lors d’une expérience menée sur des enfants de 8 à 12 ans, les scientifiques ont remarqué que chez les enfants atteints de dyslexie grave, l’augmentation de l’espacement des lettres a entrainé une justesse de déchiffrage multipliée par deux et une vitesse de lecture accrue de 20%. En revanche, on ne constate aucune différence de vitesse de lecture ni de justesse de déchiffrage chez les enfants non-dyslexiques.
Parallèlement, une application iPad/iPhone nommée « DYS » a été élaborée par Stéphane Dufau, ingénieur de recherche au CNRS, au Laboratoire de psychologie cognitive. Disponible dans un premier temps en français et en anglais et téléchargeable gratuitement sur l’AppStore, elle permet aux parents et aux enfants de manipuler l’espacement des lettres et de tester les bénéfices de cette manipulation sur la lecture. Grâce à cette application, les chercheurs pourront recueillir à grande échelle des données qui leur permettront de quantifier puis d’analyser s’il existe un espacement optimal en fonction de l’âge de la personne et du niveau de lecture. L’application est à télécharger ici.
Partant de ce constat, Christian Boer, un graphiste néerlandais atteint lui-même du trouble, a commercialisé une police spécifique, qu’il a appelée DYSLEXIE. Ce n’était pas la première du genre mais la plus médiatisée à la suite de la parution d’un article du Scientific American expliquant qu’elle est particulièrement bien reçue par les dyslexiques. Néanmoins, c’est une police payante (à partir de 9,95 euros par an).
« Dyslexie » est de plus en plus utilisée et proposée dans différents types de supports. Elle fait notamment l’objet d’une série d’applications pour smartphones et tablettes. C’est par exemple le cas de l’application Navidys pour Ipad. Cette application permet de naviguer en police Dyslexie en proposant à l’utilisateur d’adapter la taille, l’interligne et l’espacement à sa meilleure convenance. L’application vBookz la propose également. Il s’agit d’un lecteur de livres audionumériques permettant à la fois la lecture assistée pour les personnes vivant avec des déficiences visuelles et un support audio à ceux qui apprennent une langue ou aux enfants qui acquièrent la lecture. Les éditions Van In comptent d’ailleurs parmi les utilisateurs de « Dyslexie ».
Si vous voulez tester la police, vous pouvez télécharger, sur le site de Dyslexie, une série de fables de La Fontaine ou de classiques pour la jeunesse en version PDF.
D’autres polices du même type existent et parfois, elles sont gratuites. Pointons, par exemple, Lexia ou encore la très prometteuse Open dyslexic créée par Aberlado Gonzalez. D’ailleurs, les concepteurs des tablettes Kobo mini, Glo et Aura HD ont décidé de proposer aux lecteurs la possibilité de lire leurs eBooks en Open Dyslexic. Il suffit pour cela de la sélectionner parmi toutes les polices proposées. Pour l’avoir testée sur une KOBO Glo, la police offre réellement un confort de lecture supplémentaire. Abelardo Gonzalez propose également sur son site une série d’autres choses amusantes : par exemple, cette tablette créée spécifiquement pour les enfants dyslexiques.
On conclura en précisant que les polices d’écriture facilitant la lecture existent depuis longtemps. Mais il est vrai qu’avec les nouveaux supports qui sont offerts au lecteur (tablettes, smartphones, écrans d’ordinateur ou encore liseuses), les possibilités qu’a chacun de lire dans ses propres « meilleures conditions » n’ont finalement jamais été aussi accessibles.
Vincianne D’Anna
— Vincianne D'Anna