Alexandre Lemaire : « La Fédération Wallonie-Bruxelles fait figure de pionnière pour l’adoption de Readium LCP en bibliothèque »
Dans le cadre de l’ePub Summit qui s’est tenu la semaine dernière à Bruxelles, Alexandre Lemaire, le gestionnaire de la plateforme de prêt numérique Lirtuel, a évoqué l’adoption de la DRM LCP de Readium (dont nous vous parlions notamment dans cet article) dans les bibliothèques. Pour Lettres Numériques, il expose les avantages de ce changement et la feuille de route du projet.
Pour quelles raisons la DRM mise en place par Readium est-elle plus intéressante que les autres DRM pour les prêts d’ebooks en bibliothèque ?
D’abord, elle offre des fonctionnalités qui ne sont pas prévues par d’autres DRM (pensons à celle d’Adobe, utilisée actuellement par PNB), comme la prolongation de prêt, le prêt à un membre de la famille et le retour anticipé. De plus, les lecteurs auront la possibilité de prolonger la durée de prêt d’un ebook à la fois depuis leur outil de lecture, mais également directement depuis leur compte utilisateur dans la plateforme de prêt, ce qui représente une nouveauté. La démarche sera ainsi simplifiée et l’utilisateur ne devra plus passer par d’autres interfaces que leur outil de lecture et la plateforme d’emprunt.
Le retour anticipé est quant à lui déjà possible avec la DRM d’Adobe, mais il fait l’objet de nombreux problèmes, qui s’affichent parfois avec des messages d’erreur incompréhensibles. Une amélioration de la situation peut être espérée avec la DRM Readium LCP.
Qu’en est-il des données des utilisateurs et du modèle économique ?
Cette nouvelle DRM assurera une meilleure protection des données personnelles des utilisateurs, qui seront décentralisées et non stockées par un unique acteur. En outre, les informations personnelles collectées seront moins nombreuses qu’auparavant.
Le modèle économique de la DRM Adobe, utilisée jusqu’à présent, n’est pas à l’avantage des bibliothèques car il fonctionne sur un système de redevance pour chaque prêt, de telle sorte que plus un livre est emprunté, plus la facture est élevée. Par contre, la DRM LCP reposera sur un système forfaitaire, qui peut varier selon le type d’institution, et qui conviendra beaucoup mieux aux bibliothèques car il réduira considérablement leurs frais. Pour ce faire, des négociations sur les prix des titres doivent être menées avec les groupes éditoriaux et les distributeurs.
Quels avantages la DRM LCP présente-t-elle du point de vue de l’expérience utilisateur ?
L’expérience utilisateur gagnera en fluidité : il ne sera plus nécessaire de créer un compte dans l’interface de la solution DRM, comme c’était le cas avec Adobe. Il suffira au lecteur d’encoder un mot de passe uniquement lors du premier emprunt avec son outil ou son application de lecture. Pour certaines applications, il n’y aura peut-être même pas du tout de clé à insérer. Cela permettra plus de transparence et une simplicité d’utilisation accrue pour le lecteur.
Où en est-on dans l’avancement de l’adaptation technique ?
Pour l’instant, nous travaillons à la spécification fonctionnelle. Par exemple, chaque plateforme pourra choisir de donner la priorité soit à la prolongation de prêt, soit à la réservation d’un livre. De ce point de vue, je tiens à souligner qu’EDRLab un est partenaire à l’écoute des besoins des bibliothèques et ouvert à la réflexion, ce qui confère une grande souplesse à LCP. L’implémentation est en cours chez des distributeurs comme Dilicom et EDEN, et Immatériel devrait bientôt y travailler également.
Le développement est prévu sur les plateformes de prêt numérique d’ici la fin du mois d’avril et c’est Lirtuel qui en sera le pilote d’expérimentation ! La Fédération Wallonie-Bruxelles fait ainsi figure de pionnière en proposant la première plateforme de bibliothèque adoptant la DRM LCP. S’il existe bien un risque d’insatisfaction des usagers pendant la période transitoire, nous pensons qu’il vaut la peine d’être pris, pour une amélioration à long terme. En effet, actuellement, 45 % des demandes reçues par notre helpdesk au niveau technique concernent la DRM Adobe.
Les tests se déclineront en trois phases :
- au printemps, des tests « en labo » seront réalisés en interne via des simulations de prêt ;
- ensuite, un groupe de testeurs volontaires parmi les usagers de Lirtuel sera mis en place ;
- enfin interviendront des tests en service régulier sur tous les usagers.
Au niveau du déploiement plus global, comme PNB est un système très ouvert avec une architecture en étoile, plusieurs composantes interviennent. Par exemple, les prestataires informatiques des bibliothèques devront gérer l’arrivée d’une deuxième DRM, ainsi que les nouvelles fonctionnalités et les interactions avec les webservices qu’elle inclut.
Sur quels supports les ebooks comportant cette nouvelle DRM pourront-ils être lus ?
Les applications de lecture habituelles, comme Aldiko et Mantano, disponibles sur tablettes et smartphones, seront facilement compatibles grâce à une mise à jour logicielle. Pour les applications qui ne la proposeront pas, les lecteurs seront renvoyés vers une application de lecture compatible avec LCP.
En ce qui concerne les liseuses, il est théoriquement possible d’effectuer des mises à jour du logiciel dans l’appareil, même si dans les faits, cela est difficilement réalisable. Il faudra donc attendre les nouveaux modèles de liseuses compatibles, comme celles de TEA et, d’ici la fin de l’année, celles de Bookeen. Ce délai est une des raisons pour lesquelles les deux DRM, celle d’Adobe et celle de Readium LCP, coexisteront un moment pour le prêt numérique en bibliothèque.
Propos recueillis par Loanna Pazzaglia
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— Loanna Pazzaglia