La lutte contre le piratage dans 18 pays occidentaux
Comment lutter contre le piratage et la contrefaçon numérique dans le monde ? Quels sont les mécanismes les plus efficaces et comment favoriser leur articulation ? La Haute Autorité pour la diffusion des œuvres et la protection des droits sur Internet (Hadopi) propose des réponses à ces questions dans un rapport exhaustif portant sur les modèles de lutte contre le piratage et la contrefaçon dans 18 pays occidentaux. Focus sur cette étude.
Cela fait trois ans que l’Hadopi s’attache à analyser les modèles étrangers de lutte contre le piratage et la contrefaçon dans ce qu’elle appelle « une veille internationale ». Si celle-ci fait habituellement partie du rapport annuel, l’ampleur du phénomène et des informations collectées a décidé le Bureau des affaires juridiques de l’Hadopi, qui a réalisé cette étude, à en faire cette année une publication à part entière.
Pour mener cette étude, l’Hadopi s’est concentrée sur 18 pays en Europe, Amérique du Nord, Asie et Océanie. Cette sélection s’est basée sur l’originalité, l’exemplarité et l’efficacité des moyens mis en œuvre dans ces pays pour protéger les droits d’auteur dans les domaines de l’audio-visuel, de la musique ou encore de la lecture numérique. Ce rapport n’est donc pas une enquête sociologique visant à identifier les profils-types des pirates ou les raisons qui les poussent à violer les droits d’auteur (nous vous proposions quelques-unes de ces raisons dans cet article), il vise plutôt à dresser une typologie des différents mécanismes de lutte contre le piratage.
Diversifier les cibles et les moyens d’actions
Comme souligné dans les premières pages du rapport, « le piratage est devenu un phénomène multiforme et tentaculaire, dépassant la question initialement posée du partage d’œuvre entre internautes, qui nourrit désormais tout un écosystème lucratif parallèle. » Partant de ce constat, les acteurs privés et publics engagés dans la lutte contre le piratage insistent sur la nécessité de diversifier tant les stratégies et les moyens d’action que les cibles à viser.
Ils prônent d’abord l’adaptation et la simplification des procédures judiciaires, celles-ci se révélant parfois trop coûteuses. Mais au-delà des poursuites pénales ou civiles lancées contre les sites illicites, d’autres types d’actions voient le jour, visant à multiplier le nombre d’acteurs de la filière numérique impliqués dans la protection des droits d’auteur.
Follow the money
Une solution de plus en plus envisagée réside ainsi dans l’autorégulation, basée sur du droit souple et des mécanismes extrajudiciaires. C’est le cas par exemple de l’approche appelée Follow the money, aujourd’hui soutenue par la Commission européenne et mise en œuvre dans de nombreux pays d’Europe et aux États-Unis. Elle se base sur une logique d’autorégulation entre les ayants droit (qui identifient les sites contrefaisants) et les acteurs de la publicité ou du paiement en ligne. La coopération entre ces deux types d’intervenants a ainsi pour but d’assécher financièrement les sites proposant des contenus illégaux en les privant de revenus.
La mise en valeur de l’offre légale
Par ailleurs, la synergie entre communication grand public et actions ciblées est une autre stratégie prônée par les pays étudiés. La promotion de l’offre légale, via notamment l’ouverture de portails recensant ce type de contenu, est l’une des stratégies de communication visant à accompagner le public vers un changement de pratique, tout en le sensibilisant sur les risques des contenus illégaux. La Belgique a d’ailleurs récemment rejoint le portail Agorateka, qui représente l’une de ces initiatives (relire cet article pour plus de détails à ce sujet). C’est également le cas de plusieurs autres pays européens pour qui la mise en valeur et l’encouragement de l’offre légale constituent un volet prioritaire de la lutte contre le piratage.
Parmi les actions ciblées, certains pays recourent à des mécanismes d’avertissements gradués (assortis ou non de sanctions) envers les internautes qui mettent à disposition des œuvres dont ils ne possèdent pas les droits, tandis que d’autres mettent en place des solutions strictement indemnitaires (les internautes concernés sont alors tenus d’indemniser les ayants droit).
Si les modèles exposés ici sont les principaux, un grand nombre d’autres moyens de lutte contre le piratage et la contrefaçon sont recensés dans la veille internationale publiée par l’Hadopi, accessible dans son intégralité via ce lien. On peut constater que les dispositifs mis en place par les acteurs privés et publics sont multiples, et misent sur des mécanismes tant répressifs qu’incitatifs. Une articulation optimale entre ces deux volets de la lutte est donc essentielle pour son efficacité, comme le souligne l’Hadopi dans ses conclusions.
Raphaël Dahl
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— Rédaction