Le numérique et le rapport à l’information : entre accessibilité et infobésité
L’émergence du numérique a permis une démocratisation sans précédent de l’accès à l’information. Entre les articles de journaux consultables gratuitement, les réseaux sociaux, les blogs, vidéos ou encore tutoriels, toute personne bénéficiant d’une connexion Internet accède aujourd’hui instantanément à une incroyable source de connaissances… qu’elle le souhaite ou non. Comment faire le tri parmi ce flux incessant de nouvelles et ne pas tomber dans une surcharge informationnelle étouffante, voire paralysante ?
L’impact positif du numérique sur notre rapport à l’information est indéniable : finies les longues heures passées dans des encyclopédies papier à rechercher une information telle une aiguille dans une botte de foin, sans même la certitude de la trouver. Aujourd’hui, entre toutes les ressources numérisées, la possibilité de commander un livre à l’autre bout du monde ou encore les informations disponibles en accès libre, les internautes ont accès à (quasiment) tout, tout le temps et les moteurs de recherche sont rapidement devenus leurs meilleurs amis.
Malheureusement, cette incroyable accessibilité, dont on ne cesse de repousser les limites, s’accompagne également d’inconvénients parfois lourds de conséquences pour les utilisateurs. Car, si ces derniers peuvent trouver facilement l’information, celle-ci peut à son tour les trouver avec une facilité déconcertante et l’on finit par se retrouver assailli par une quantité d’informations qui ne nous sont pas forcément utiles et dont la qualité laisse parfois perplexe.
Quand l’accessibilité se transforme en infobésité
L’infobésité, ou surcharge informationnelle, est un phénomène qui se traduit par l’incapacité d’une personne à traiter le flux trop important d’informations qu’elle reçoit sans en subir de conséquences nocives (parmi lesquelles une perte de temps, de la fatigue mentale voire un isolement social dans des cas extrêmes). Si cette notion existe depuis longtemps et s’applique également à la télévision et ses chaînes de diffusion d’information en continu, elle a réellement pris tout son sens avec l’arrivée du numérique et d’Internet : qu’on le veuille ou non, notre esprit est constamment sollicité par des dizaines d’informations à partir du moment où l’on se connecte. Dans une société de plus en plus dominée par le numérique et les smartphones, ce sentiment ne cesse de prendre de l’ampleur et se ressent principalement au niveau des réseaux sociaux, où se mélangent les publications de vos amis, de journaux, de publicités, etc., avec plusieurs conséquences directes :
- Trop d’information tue l’information
Face à une telle masse de données, beaucoup se sentent désemparés et éprouvent des difficultés à mettre la main sur une information qui soit à la fois fiable et pertinente. Le célèbre site internet Wikipedia, basé sur la participation volontaire des internautes, illustre parfaitement ce sentiment : alors qu’il figure parmi les adresses les plus consultées sur la Toile, les informations que l’on y trouve ne sont pas toujours vérifiées et sont donc à prendre avec des pincettes.
Cet océan d’informations tend également à perdre le lecteur : parti pour se renseigner sur un sujet, celui-ci se retrouve une heure plus tard sur une page sans aucun rapport avec sa recherche de départ, perdant ainsi le fil de ses pensées et un temps précieux. À l’inverse, cette surcharge peut également entraîner une banalisation de l’actualité, provoquant une indifférence progressive de la population.
- Quand les nouvelles vont (trop) vite
En une minute à peine, il vous est aujourd’hui possible de prendre connaissance d’un événement qui vient de se produire à l’autre bout du monde. L’information est partagée, repartagée, avant même d’avoir été réellement analysée. On assiste véritablement à une « course aux clics » plus qu’à une réelle volonté de proposer une information de qualité. Les journaux et magazines sont eux-mêmes victimes de cette tendance et doivent se prendre au jeu s’ils veulent espérer rivaliser avec la rapidité des réseaux sociaux tels que Twitter ou Facebook. Cette propagation effrénée provoque également un sentiment de dramatisation des événements puisque tout peut prendre une ampleur démesurée en l’espace de quelques minutes à peine.
- La désinformation 2.0
Certes, Internet représente une source de connaissance incroyable et constitue un levier de sensibilisation et de rassemblement époustouflant, mais il s’agit également d’un redoutable outil de manipulation. Si l’objectivité de l’information semblait impossible à atteindre auparavant, Internet a d’autant plus accentué sa subjectivité en donnant la possibilité à chacun de s’exprimer sans aucune contrainte, sans obligation de vérifier ses données. Là encore, il est possible d’atteindre un public très large, très vite, avec un impact parfois effrayant.
Comment lutter contre l’infobésité ?
Bien que la surcharge informationnelle devienne de plus en plus difficile à éviter, quelques solutions permettent de quelque peu l’endiguer :
- Filtrer l’information : qu’il s’agisse de votre boîte mail, de votre fil d’actualité Facebook, de vos abonnements à diverses sources d’informations, il vous est possible de filtrer le flux d’informations que vous recevez afin d’en diminuer la quantité et de pouvoir vous concentrer sur les nouvelles les plus pertinentes pour vous ;
- Choisir des sources fiables : il est possible de trouver le meilleur comme le pire sur Internet, et le mieux reste de se concentrer sur quelques sources dont vous pouvez compter sur la fiabilité ;
- Dédier des moments précis à la recherche d’informations : plutôt que de sauter de page en page et de lire tous les articles en une fois, n’hésitez pas à garder certains articles en réserve et à les consulter plus tard ;
- Limiter son temps de connexion : beaucoup d’applications dont le but est de vous aider à gérer le temps que vous passez sur certains sites (ou sur Internet de manière plus générale) ont vu le jour ces dernières années. Parmi celles-ci, notons RescueTime : une fois installé sur votre ordinateur, le programme enregistre le temps que vous passez à travailler ou à consulter les réseaux sociaux et autres. Une bonne manière de tirer des conclusions sur vos habitudes et de prendre des mesures pour augmenter votre productivité.
— Mélissa Haquenne